Les Bauges en artif'






Le groupe espoir Ile-de-France a réalisé les 8 & 9 avril un stage d'escalade artificielle dans les Bauges, sur les flancs du mont Peney. Au programme : coinceurs, crochets, pitons ...et quelques plombs !
Voici le récit de ces journées par les jeunes de l'équipe :
"Ben qu’est-ce que c’est que ça ?" Alain, Juliette, Hugo et Maximilien regardent ébahis Simon sortir une trompette de son van avec une tête de gamin à noël. Il la trimbalera avec lui tout le week end, religieusement accompagnée de son huile pour piston afin de nous jouer quelques notes ou des "poiin poiin poiiiiiin" quand on dévisse. Le joyeux drille n’a décidément pas fini de nous étonner !
Vendredi soir, le rendez-vous est pris pour 19h à la gare de Chambéry. De là on suit Simon et sa conduite douteuse, direction le Mont Peney. Une barrière forestière mal placée vient briser notre lancée et rallonger notre marche d’approche du lendemain. Tant pis! Nous dormirons donc sur le parking, le camp s’installe à grand renforts de dérapages sans queue ni tête, de projections de gravillons et de grands phares dans les yeux par un Simon toujours aussi surexcité. Le réveil sonnera bien tôt à notre goût, puis le petit déjeuner expédié nous nous attelons à une tâche fort intéressante : le chargement des litres d’eau, tonnes de matos et de portaledge sur nos lombaires qui hurlent. En route pour la grimpe! Nous arrivons à la falaise ruisselants et ahanants sous un soleil qui nous brûlera consciencieusement tout le week-end. Un grand cri et une belle chute d’un grimpeur de cordées déjà à l’attaque nous met dans l’ambiance. Simon sort sa trompette et nous hurle un peu dessus pour activer les choses. On se retrouve avec des tonnes de pitons, un marteau, une corde de liaison chacun, une voie et feu devant. Après une chute au deuxième point de Maximilien, Simon daignera nous donner quelques explications concernant les pitons, crochets et comment les placer. On repart dans nos voies respectives, les pitons commencent à chanter, on avance en renâclant légèrement (surtout quand il faut mettre des crochets).
Après deux-trois heures dans nos longueurs à faire sprinter Simon qui assurait et envoyait le matos aux quatre apprentis à la fois, nous attaquons le dépitonnage et le déséquipement de la longueur, activité douce et propice aux tendinites… Une fois au sol, on expédie le déjeuner et la première cordée Juliette/Maximilien attaque sa voie. Juliette qui s’est découvert une passion pour l’artif’ mène magistralement sa longueur, avec une efficacité et une détente qui forcent le respect de notre guide dubitatif. Jusqu’à ce qu’un petit mouvement de corde sorte Maximilien de sa somnolence bienheureuse (assurage au top), un piton mal placé a laché Juliette juste sous le relai! Le tirage assure visiblement bien tout seul, et Juliette termine sans accroche sa longueur. Il est temps d’envoyer à Juliette la “patate” sac de hissage, Simon ainsi qu’un portaledge déjà tout monté. Dans la voie juste à côté Alain avance dans sa première longueure et Hugo peaufine sa cuisson à l’assurage. A droite ça y est, le portaledge flotte au vent, le matos est bien rangé sur la daisy chain, le sac à patate arrimé, le ménage fait Maximilien n’a plus qu’à rejoindre sa pénate préparée avec soin par Juliette. L’arrivée sur le portaledge est scabreuse, ça a pas l’air très stable ce truc… Alain a terminé sa longueur mais ne sait pas comment hisser le sac et le portaledge, Hugo monte donc lui prêter main-forte. Des cris de frustrations ne tardent pas à se faire entendre, des pitons récalcitrants refusent de sortir de leurs petits trous au chaud! Et sans chaîne à dépitonner l’affaire est vite malaisée. Ah force de grognements et de brutalité, Hugo parvient au sommet avec quasi tout le matos, un irréductible piton ayant résisté encore et toujours au marteau. Après une petite gueulante quand il se sera rendu compte qu’il est remonté sur un relai non triangulé, Hugo apprend sur place à tresser un nœud de chaise pour trianguler sur les trois points et aide Alain à hisser leur portaledge et leur patate. Il est temps pour Hugo et Maximilien de repartir, la motivation n’est pas au paroxysme chez Maximilien qui jette des regards pleins d’espoir à Hugo :”tu y vas aussi ou pas ?” le soleil couchant constitue une bonne excuse, mais l’impitoyable regard de Simon et Juliette pressent. Une demi tablette de chocolat avalée pour reprendre du mental, Maximilien part dans sa longueur et Hugo ne tarde pas à suivre. Assurage allongés sur le portaledge pour Alain et Juliette, la vie est belle. Plus haut Hugo et Maximilien savourent finalement cette longueur aux dernières lueurs du jour, avec du gaz sous les fesses. Le calme de la nuit tombante n’est perturbé que par les coups de marteau et Simon qui fera tomber une partie du contenu de la patate d’Hugo et Alain dans la forêt en contrebas. On en gardera un peu pour demain et on se fait mouliner au portaledge pour attaquer notre premier épisode de cuisine de l'extrême. On se prépare pour la bouffe et la nuit, la chose n’est pas aisée sur les portaledges, petits dériveurs pendus dans la paroi prêts à se retourner si on ne s’équilibre pas bien. On sort les réchauds et la bouffe, Simon a été clair: si vous faites tomber le jetboil, le portaledge et les sangles prennent feu, on vous ramasse à la petite cuillère. Dans les deux portaledges on serre les fesses et on retient sa respiration le temps de faire bouillir l’eau d’une semoule réparatrice. Vient ensuite l’épreuve du pipi par-dessus bord, chacun sa technique pour réaliser ce petit exploit, celle d’Hugo particulièrement intéressante consistera à ne pas aller aux toilettes, trop stressé? Assommés de fatigue, Juliette et Maximilien se couchent vite, snobant les tentatives de communication venant du portaledge voisin.
La nuit fut plus ou moins réparatrice, tout le portaledge bougeant au moindre mouvement, mais quelle beauté, quelle sensation incroyable que de dormir dans ce nid suspendu! Maximilien profitera plus que d’autres des sensations, aggripé toute la nuit aux sangles pour ne pas glisser par-dessus bord avec son tapis de sol qui glisse vers l’extérieur. Mais dormir en baudrier avec la vache dans le sac sera finalement plus confortable que ce que nous imaginions. Le soleil nous réveillera en cognant de bon matin, on se émerge plus ou moins péniblement pour prendre un petit dej panoramique.
Hugo attaque son dérouillage matinal par un fil d’araignée et une belle remontée sur corde pour aller vider sa vessie sur le rassurant plancher des vaches. Alors qu’on se prépare à retourner dans nos longueurs, Simon surgit sur le portaledge de Juliette et Maximilien et suffoque sous l’attaque des chaussette portées trois jours par Maximilien, pourtant cachées au fond de la patate. Ni une ni deux, elles volent par-dessus bord sous les yeux soulagés de Juliette. Le pot de confiture profite de l’agitation pour sauter par-dessus bord lui aussi. Heureusement qu’on ne partait qu’une nuit à ce train-là de boulettes, en une semaine on n’avait plus d’affaires ! Hugo et Maximilien reprennent leur longueurs dans un rocher plus ou moins rassurant. Maximilien terminera vite sa longueur, il fixe sa corde et redescend sur le portaledge, puis s’esquive jusqu’au sol, laissant Juliette déséquiper et démonter le relai, envoyer le portaledge et la patate sous la tutelle de Simon. Affaire rondement menée, et le duo pourra admirer à l’ombre avec une bonne bouteille d’eau leurs compères qui suent et pendouillent dans leurs baudrier. La chaleur est écrasante et ils préfèrent sagement déjeuner plutôt que de repartir dans une couenne.
Finalement Alain touche le plancher des vaches, récupère les affaires que lui descend Hugo et les rejoint. Hugo termine ses manips nous rejoint et l’on se tasse sous le carré d’ombre dispensé par le portaledge pendu à ras le sol. On dévore tout ce qui tombe sous nos mains, puis Simon nous montre le dernier joujou d’artif’ que nous n’avons pas vu: le plomb! Goguenards on le regarde choisir un vague renfoncement poussiéreux et commencer à écraser son plomb dedans à grands coups de marteaux. Le plomb se déforme et épouse la forme du trou comme un chewing-gum, mais qui serait assez fou pour se suspendre à un chewing-gum? Impossible que ça tienne déclare catégoriquement Alain! Et pourtant, Simon clipse une sangle, charge doucement son poids dessus et… ça tient ! On veut tous vérifier, on envoie d’abord le petit gabarit de Juliette, puis on rajoute du poids en mettant Hugo et enfin on envoie Maximilien, le plomb tient! Bluffant! Le caquet rabroué, nous rechargeons nos sacs, un chouilla allégés par les litres d’eau que nous avons engloutis, et l’exode reprend dans l’autre sens, direction les voitures. Poser les sacs est une délivrance, mais il nous faut les vider et tout étaler par terre pour entreprendre le long et fastidieux tri de la montagne de matos que l’on a allègrement mélangée durant tout le week-end. L’heure tourne et il est temps pour Alain d’attraper son train et Juliette de prendre son covoitureur. Le rendez-vous et pris pour le prochain stage, on espère aussi dingue que celui-là! L’artif on a trouvé ça bien plus marrant que ce qu’on pensait, et un grand merci à Pierrick qui nous a prêté son matos pour le week-end.