Marion Salmon-Thomas : « Je n'ai jamais mis la compétition entre parenthèses »

Publié le 8 décembre 2025

Membre de l'équipe de France d'escalade sur glace depuis sa création, Marion Salmon-Thomas avait fait un pas de côté dans son parcours d'athlète l'année dernière au profit de sa maternité. Aujourd'hui maman d'un petit Milo, 6 mois, elle n'a rien perdu de sa motivation et retrouve la compétition comme si elle ne s'en était jamais écartée : déjà trois podiums* cette saison. Elle nous explique comment elle a joint les deux mondes, celui de la maternité et celui de la compétition.

Sur la plus haute marche du podium à Zilina le 29 novembre dernier © Martin Komlossy - UIAA Sur la plus haute marche du podium à Zilina le 29 novembre dernier © Martin Komlossy - UIAA

FFCAM : Après une année blanche au niveau de la compétition, nous te retrouvons apparemment en pleine forme pour la saison 2025-2026, quelles sont tes sensations ?Marion Salmon-Thomas : Tout s'est très bien enchainé dans ma préparation, j'ai encore quelques incertitudes, mais je suis fière du chemin parcouru. J'ai hâte de voir ce que je suis devenue, de sentir comment je vais encore évoluer. Chaque étape de ma préparation compte, je les prends toutes à leur juste valeur : j'accepte, je digère et j'avance jusqu'à l'étape suivante… jusqu'au rendez-vous de janvier : la première étape du circuit de la Coupe du monde en Corée du Sud.

FFCAM : Comment réussis-tu à combiner tous les pans de ta nouvelle vie, la maternité, les entrainements, la compétition, ton activité professionnelle ?
Marion 
: J'ai repris le travail après le congé maternité, j'avais à cœur de retrouver mes missions. Cette transition s'est heureusement bien déroulée. À cette reprise, s'est ajoutée la montée en charge progressive de l'entrainement et la fatigue, qui, quoi qu'on en dise et quoi qu'on veuille, s'accumule avec des nuits fragmentées et le quotidien partagé avec un bébé.
J'ai essayé de prendre toutes ses phases avec le plus de discernement et de recul possible pour arriver à les accepter et à mettre en œuvre ma préparation, toujours une étape après l'autre. La venue d'un petit être chamboule tellement le corps et le quotidien, c'est une recherche permanente d'équilibre. Je ne suis plus le personnage principal de ma vie et j'apprends à gérer des aléas, mais c'est une expérience magique !

FFCAM : Quels sont tes objectifs ?
Marion
: mon objectif a toujours été, et reste, de faire partie des leaders mondiaux. Cette saison 2025-2026, je l'ai dans le viseur depuis le début de ma grossesse. Je n'ai jamais mis la compétition entre parenthèses. Ma grossesse a juste été un report d'objectif. Pendant cette période, je suis donc restée dans une phase de préparation et dans l'état d'esprit qui va avec, tout en vivant les changements qu'implique la maternité. La compétition me fait toujours autant vibrer. Je souhaite retrouver les finales de Coupes du monde, et j'ai adapté les différents pans de ma vie pour atteindre cet objectif.   

FFCAM : Concrètement, comment as-tu organisé ta vie pour conjuguer ta vie de mère et d'athlète ?
Marion : Dès le début de la grossesse, je me suis entourée de professionnels pour m'accompagner jusqu'en postnatal : un kiné et une préparatrice spécialisés sur la maternité, et du yoga prénatal. Cela m'a permis de comprendre les évolutions de mon corps, ce que je pouvais encore travailler, ce que je devais au contraire préserver. Je n'ai, par exemple, pas sollicité mes grands droits pour que leur régénération se fasse plus rapidement après l'accouchement. La vérité d'un jour n'est pas celle du lendemain, avec la fatigue, il faut adapter, rester à l'écoute des signaux du corps et réajuster si nécessaire. De façon globale, je m'exerçais moins longtemps, moins intensément, mais plus régulièrement. Tout cela fait partie des règles d'or établies avec le corps médical pour ma santé et celle du bébé.

Lors de la finale à Bern le 22 novembre, elle décrochera une médaille d'argent © Hugo Vincent / O'Bloc - UIAA Lors de la finale à Bern le 22 novembre, elle décrochera une médaille d'argent © Hugo Vincent / O'Bloc - UIAA

FFCAM : Rester dans une pratique sportive soutenue, tout en vivant une maternité, est donc tout à fait gérable ?
Marion : Recontextualisons : il est tout à fait possible de pratiquer des activités que l'on faisait déjà avant en étant enceinte, mais à une intensité plus basse et en gardant la totale maitrise de ce qu'on fait. J'ai continué à grimper en second jusqu'à quelques semaines du terme, tant que je me sentais en sécurité. J'ai fait de la préparation physique jusqu'à la fin.  Grimper, c'est marcher verticalement pour moi, le risque était mesuré à mon sens. En postnatal, on peut à peu près tout refaire, mais progressivement et différemment. Je saisissais chaque opportunité, la sieste de Milo, une mode de garde, pour faire de la musculation. J'avais beaucoup plus d'énergie après mes exercices qu'après une sieste !  Dans le milieu de la glace, il y a peu d'exemples d'athlètes devenues mères au cours de leur carrière, mais il y en a dans d'autres sports. J'ai ainsi beaucoup échangé avec Chloé Trespeuch, (snowboardeuse française, ndlr), qui a eu un bébé fin 2024. 

FFCAM : Un conseil pour les mères et futures mères passionnées de sports de montagne ?
Marion : Renseignez-vous, lisez, échangez avec d'autres mamans, et surtout, autorisez-vous à reprendre ! Avec un petit, on peut vite être pris H24. Si vous attendez que le moment s'offre à vous, ce sera long. Créez le moment, exprimez votre besoin à votre entourage, à votre compagnon, pour qu'on vous dégage du temps. Osez !

 

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